Une leçon reçue de la vie de Thây
Cher Thây, chère sangha,
Comment trouver un moyen d’aller de l’avant au cœur même de cette période de guerre et d’obscurité qui semblent sans issue ? Des deux côtés, des personnes se rassemblent pour manifester, pour s’asseoir en paix, dans l’espoir d’inciter notre gouvernement à changer. Mais rien ne semble fonctionner et nous sommes désespérés.
~ Question soulevée par un membre de la Sangha israélienne
Peu importe le domaine, si nous sommes à même de réverbérer la paix, faisons-le. Cela compense l’impuissance. C’est ce que nous avons appris de Thây. Lorsque les villages du Viêt Nam ne cessaient de subir les bombardements, les jeunes ont demandé à Thây s’ils devaient abandonner ou reconstruire. Thây savait qu’il était important de ne pas abandonner et de ne pas se laisser envahir par le désespoir. Il a recommandé aux villageois d’y retourner et de reconstruire. Ce n’est pas par entêtement, mais parce que cela nous donne un but où placer notre énergie. Pour contrebalancer notre désespoir, nous devons mettre notre énergie au service de quelque chose qui grandit et prospère.
Si nous pouvons prendre soin de tout notre cœur d’une petite plante en pot, nous ne nous laisserons pas happer comme une victime de l’actualité. Lorsque nous nous réveillons le matin et que nous entendons des nouvelles négatives, nous devons les contrebalancer par autre chose.
Je ressens la chance d’avoir un lieu et un moyen où déployer mon énergie pour bâtir un monde de paix. Prendre soin des plantes, prendre soin de mes jeunes frères, construire une sangha … c’est une chose bien réelle, et il ne s’agit pas de rester assis à prier pour l’obtenir. Cela aide à être moins contrarié, moins dualiste, et à ne pas choisir un camp. C’est cela la paix. Nous pouvons observer la plante, sa croissance, sa prospérité et son dépérissement.
La nouvelle feuille naît de la mort des feuilles plus anciennes. En voyant cela, nous ne jugeons plus, ni un côté ni l’autre.
Je me souviens du jour où nous avons appris la nouvelle du 11 septembre, alors que nous étions aux États-Unis en 2001. Thây a emmené la sangha sur la plage afin d’y marcher paisiblement. C’est une cloche de pleine conscience qui nous évite de nous noyer et de devenir victime.
Si nous avons de la chance, nous pouvons nous trouver en un lieu susceptible d’engendrer une énergie plus paisible. C’est ce que nous pouvons apprendre de la vie de Thây. Il n’a jamais été victime d’un moment historique. À chaque moment de sa vie, Thây a toujours créé une voie différente. La sangha est un excellent lieu où investir notre énergie.
Un des mantras que je pratique en ce moment me rappelle que l’humanité est en train de traverser sa phase d’adolescence. Cela m’aide vraiment à supporter ce qui arrive à notre planète. L’égoïsme, la destruction, les reproches… tout cela est une phase. C’est ce qui se passe dans notre monde. Ne restons pas bloqués là-dedans. Ne voyons pas cela comme quelque chose de négatif ; nous devons tous passer par cette phase. Cela m’aide vraiment à voir que l’humanité, en tant qu’enfant, traverse son adolescence. Et cela me donne l’espace nécessaire pour faire face à ce qui se passe, et qui se fonde sur l’ignorance et la discrimination.
~ Réponse offerte le 28 janvier 2024 par Frère Phap Dung (Étreinte du Dharma)