Reconnaître le Bouddha en soi
Quelques réflexions au sujet du Bouddha, ses Enseignements et la Cérémonie du Vesak
Extrait d'un Enseignement du Dharma offert le 11 mai 2023 par Soeur Chan Duc, au Village des Pruniers (Hameau du Haut), France.
Laisse Bouddha respirer
Laisse Bouddha respirer
Laisse Bouddha s’asseoir
Pas besoin de respirer
Pas besoin de s’asseoir
C’est Bouddha qui respire
J’apprécie la respiration
J’apprécie l’assise
Le Bouddha est la respiration
Je suis la respiration
Le Bouddha est l’assise
Je suis l’assise
Nous pratiquons aujourd’hui pour reconnaître notre nature de Bouddha. La question est de voir le temps qu’il nous faut pour reconnaître notre nature de Bouddha. L’exercice que nous venons de pratiquer en chantant nous est transmis par Thây.
Un jour, Thây fut convié à Séoul, en Corée du Sud, afin de guider une marche méditative à l’intention de milliers de personnes de l’Université. Il était entouré d’un tel nombre de caméramans que Thây ne parvenait pas à voir la direction à suivre ; il ne distinguait que les caméras. Thây dit alors qu’il allait ‘laisser le Bouddha marcher’.
Nous venons de chanter ‘laisse le Bouddha s’asseoir’ mais nous pouvons aussi laisser le Bouddha marcher. D’une certaine façon, il y avait place pour que Thây marche. Thây n’a pas dit à haute voix ‘laissez le Bouddha marcher’ ; il l’a dit intérieurement. Parfois, nous n’avons pas l’œil de Bouddha qui peut voir le chemin à parcourir, mais nous pouvons trouver l’œil de Bouddha en nous-mêmes en nous souvenant du Bouddha.
Nous avons déjà toutes et tous entendu parler du Bouddha ou lu à son sujet et, d’une certaine façon, cette lecture ou ce que l’on en a entendu a arrosé une graine en nous ; ainsi, quand nous prononçons le nom ‘Bouddha’, cela arrose cette graine et nous nous souvenons que c’est ainsi que le Bouddha voyait les choses.
Je me souviens de la période où une de mes amies suivait une chimiothérapie, entraînant beaucoup d’inconfort. Je lui ai demandé ce qu’elle pratiquait lorsqu’elle ressentait cette gêne et elle m’a répondu : “La seule pratique qui fonctionne pour moi est de laisser le Bouddha respirer, je n’ai pas besoin de respirer”. Il semble donc que nous puissions très rapidement trouver cette graine de Bouddha et l’arroser pour qu’elle se manifeste.
Au début, nous pensons que c’est le Bouddha qui respire, que c’est le Bouddha qui marche. Puis nous sentons que cette respiration, cette marche que j’appelle ‘Bouddha’ est aussi quelque chose qui se passe en moi, et que je peux en profiter.
Dans les deux premiers vers, il y a “je” et il y a “Bouddha”. Puis nous commençons à voir autre chose : Bouddha est la respiration, Bouddha est la marche. Comment Bouddha se manifeste-t-il en ce moment ? De toute évidence, cet être humain né il y a plus de 2 500 ans ne se manifeste pas en ce moment. Mais la façon dont le Bouddha marchait, transmise de génération en génération puis parvenue jusqu’à nous par l’enseignement de notre maître, peut maintenant se manifester dans le moment présent.
Nous nous disons alors : “Je suis en train de marcher”, et nous devons donc dire quelque chose comme “Je suis en train de marcher”. Je ne fais plus qu’un.e avec le Bouddha. Le Bouddha est la marche, je suis la marche”. Vous ressentirez peut-être un peu de confusion au début de cette méditation mais, plus tard, vous vous direz : “Je n’ai pas besoin de faire de distinction entre Bouddha et moi-même”. Dans les deux premiers vers, j’ai fait cette discrimination, maintenant je dois faire la transition vers un état de non-discrimination entre Bouddha et moi-même.
Reconnaître la Nature de Mara en soi
Si nous rencontrons des difficultés avec une personne, nous ne voyons pas toujours en elle la nature de Bouddha. Nous voyons une autre nature qui s’appelle la nature Mara. Mara est l’opposé de Bouddha. Et nous avons tous la nature Mara. C’est quelque chose que nous devons reconnaître. Lorsque nous disons que nous avons la nature de Bouddha, cela ne signifie pas que nous n’avons pas la nature Mara. Il s’agit de la nature non éclairée.
Ce matin, au Hameau du Bas, nous avons lu le Soutra des méthodes pour mettre fin à l’irritation et à la colère, pour nous aider à voir la nature de Bouddha.
Dans le Soutra, la quatrième façon de mettre fin à la colère concerne une personne dont les actions corporelles ne sont pas aimables, dont les paroles ne sont pas aimables et dont la pensée ne semble pas contenir de bonté. Si nous sommes en colère contre cette personne et que nous sommes sages, nous saurons comment pratiquer pour mettre fin à notre colère.
Supposons qu’une personne entreprenne un long voyage. Le village qu’il a quitté est loin derrière et sa destination est loin devant. En chemin, cette personne tombe très malade. Il ne peut pas poursuivre son voyage et, allongé sur le bord de la route, il doit se rendre à l’évidence : il va mourir. Mais quelqu’un d’autre arrive, voit la situation de cet homme et lui dit : “Je vais t’aider, mon ami”.
Il l’emmène au village le plus proche et, une fois à destination, il lui fournit des médicaments, la nourriture dont il a besoin, un endroit où s’allonger et se rétablir. Grâce à cela, la vie de cet homme est sauvée. Ainsi, lorsque vous voyez quelqu’un dont les actions corporelles, les paroles et les pensées ne sont pas aimables, vous devez savoir que cette personne souffre profondément et que ce n’est qu’en faisant preuve de compassion à son égard qu’elle pourra être libérée de ses souffrances.
C’est la pratique de Śāriputra, le plus ancien disciple du Bouddha. Sa pratique était tellement bonne et profonde que lorsqu’il rencontrait une personne particulièrement jalouse de lui et qui le calomniait, il était capable de pratiquer de la sorte. Il nous arrive donc de regarder quelqu’un et de constater qu’il a simplement la nature Mara, mais nous devons y regarder à deux fois. Nous devons voir pourquoi elle a cette nature Mara : parce qu’elle souffre.
Lorsque nous parvenons à comprendre la profondeur de cette souffrance, nous sommes en mesure de donner lieu à la compassion qui, à son tour, nous montrera naturellement le chemin à suivre. Nous ouvrirons notre oeil de Bouddha de façon à voir comment aider cette personne à souffrir moins et à transformer sa souffrance. C’est pour cette raison que nous disons que la compréhension est la compassion et que cette compréhension doit inclure de la compassion et ne pas en être séparée. Il nous arrive de dire ‘Oh oui, je comprends cette personne, je comprends sa souffrance et, malgré tout, je ne parviens pas à sentir de compassion et je ne peux donc pas la pardonner’. C’est parce qu’il n’y a pas de compassion dans cette compréhension.
Si vous éprouvez des difficultés avec une personne, vous ne voyez en elle que la nature de Mara ; et il est bon de parvenir à se dire (juste avec notre intellect) que ‘Cette personne a la nature de Bouddha en elle, le Bouddha me l’a enseigné, Thây me l’a enseigné’. Si vous parvenez à vous dire cela intérieurement, vous bloquerez pas complètement votre perception de la nature de Bouddha nature en cette autre personne.
Laissez le Bouddha respirer, pas besoin de respirer. Ne vous forcez pas. La nature de Bouddha est là. Vous n’avez pas à vous répéter ‘je dois respirer, je dois respirer’ ; en réalité, si vous laissez simplement l’espace, le Bouddha respirera pour vous.
Lien vers l’enseignement du Dharma de Soeur Chan Duc (en anglais)
Quelques autres références à la célébration de Vesak
S’asseoir avec le Bouddha
Dans cette méditation guidée, Thây nous invite à nous asseoir avec le Bouddha
Autres enseignements consacrés à Vesak (en français)
Soeur Từ Nghiêm : “Je vois le Bouddha comme un être humain, tout d’abord, et je considère le Bouddha comme un grand Maître, comme un guide pour moi dans ma vie quotidienne. Et être un être humain signifie qu’il a ressenti toutes les émotions que je ressens et son humanité pour moi est la profondeur de son enseignement. Il a vécu pleinement sa vie en tant qu’être humain.“
Autres témoignagnes
Frère Pháp Bieu : “Je pense que Vesak est un événement qui nous enseigne la gratitude envers les belles conditions que nous avons dans notre vie. Nous sommes parmi ces gens chanceux qui ont trouvé un chemin dans la vie. Nous avons une direction… Cette direction est un très beau chemin qui nous apprend la transformation. Et cela nous fait avancer et non pas stagner dans un état d’esprit, une idée, une croyance.”
Frère Pháp Lai : “Ce que nous faisons vraiment, c’est cultiver la capacité à être en contact avec cette nature qui est déjà là, toujours là, dans une plénitude qui nous attend. Nous voulons voir le sens du rituel. Et quand on voit le sens, on peut mettre notre coeur en faisant ce rituel.“
Malam Suci Waisak (La nuit sainte du Vesak)
La chorale monastique du Village des Pruniers s’est rassemblée pour enregistrer la chanson indonésienne Malam Suci Vesak (La sainte nuit de Vesak), en guise d’offrande pour le jour de Vesak. Cette chanson est communément chantée en Indonésie le jour de Vesak pour commémorer la naissance, l’éveil et la mort du Bouddha. Belle écoute !
Nous vous invitons à découvrir la vie du Bouddha à travers l’ouvrage de Thich Nhat Hanh “Sur les traces de Siddharta“
Sur les Traces de Siddharta
Svasti était un jeune bouvier qui quitta sa famille pour suivre Siddharta Gautama. En nous faisant le récit de son cheminement aux côtés de celui qui deviendra le Bouddha, Thich Nhat Hanh – recourant à des sources palies, sanscrites et chinoises inédites – nous dévoile le visage du sage dans toute son humanité. Mêlant à la vie et aux enseignements de ” l’Éveillé ” les principaux sûtras, il nous livre une merveilleuse biographie riche de ressources spirituelles.
Un ouvrage qui retrace la vie du Bouddha en soulignant la simplicité et l’humilité de son enseignement. Riche en anecdotes et plein de poésie, ce livre est devenu un classique.
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